La grève des femmes de chambre de l’Ibis Batignolles, l’article de Clément Dechamps, paru dans lundimatin#240, le 27 avril 2020
Ceci est l’histoire d’un combat.
Un combat acharné, irrationnel, peut-être fou.
Dans cette histoire il n’y a ni bon ni méchant.
Il y a juste un système.
Un système économique, social, politique.
Un système où “sous-traitance” rime avec “maltraitance”.
C’est l’histoire de vingt femmes de chambre qui ont jeté l’éponge…
Et qui ont pris les armes.
Cette chambre est propre. Au moment où vous y entrez, quelqu’un vient d’en sortir. Avant que vous ne déposiez votre valise et ne goûtiez au confort de votre lit, quelqu’un a éteint le chauffage, aéré la pièce, vérifié que le client précédent n’a rien oublié, informé sa hiérarchie en cas de détérioration, vidé vos tiroirs, débarrassé les détritus et le linge souillé, lavé le sol de votre salle de bain, nettoyé votre baignoire, votre lavabo, votre miroir et vos toilettes, frotté vos plinthes et l’encadrement de vos fenêtres, lavé vos vitres à l’intérieur, installé votre linge et vos produits d’accueils, refait votre lit, vérifié le fonctionnement de votre équipement, votre télé, vos ampoules, passé l’aspirateur sur votre moquette, votre fauteuil, vos rideaux, fermé la fenêtre et rallumé le chauffage. Le tout, en dix-sept minutes…
En déclenchant cette grève, c’est leur dignité que sont parties retrouver les femmes de chambres de l’Ibis-Batignolles. Leur dignité en tant que femmes, en tant que travailleuses immigrées, en tant que rouages essentiels de la machine économique. Leur dignité face aux bénéficiaires réels de leur travail quotidien mais également face aux clients et aux autres travailleurs de l’hôtellerie.
Pendant la période de confinement, les grévistes ont obtenu de la STN d’être placées en chômage partiel, ce qui leur permet de toucher 84% de leur salaire. C’est également pour elles l’occasion de reprendre des forces avant de relancer la grève dès la fin du confinement.


L.C.
L.C.
L.C.
L.C.
L.C.