Je suis couverte de petits miroirs

Je tournoie comme un ballon de plage.
Je peux être aveuglante.
Qui me regarde croit me voir.
Qui me regarde se voit lui-même.
Sa propre grimace monstrueusement déformée.
Qui me fuit se chasse lui-même.
Je suis couverte de petits miroirs.
Les bords coupent ma propre chair.
Je suis :
une mosaïque chatoyante
avec des jointures rouges molles
et un cœur blanc comme neige –

Eva CoxPritt.stift.lippe. 
Traduction de Kim Andringa

A l’aube,

tu descendras pieds nus
Boire à la rivière
Comme ces chats muets
Aux pattes cramoisies

Tu glisseras sur les pentes
Endormies de plaisir
Suivre la piste argentée
Des limaces écrasées

Tu iras au midi chercher l’évidence
Qu’un jour ici tu as vécu
Qu’il y avait des enfants, des amis,
Un amour, une constance

De tout cela demeurent
Que le ciel bas, les herbes grasses
L’eau violente,
Les ruches abandonnées

Tu tends l’oreille
Aux voix des absents
Jusqu’à ce que la nuit enfin
Consente à te parler.

Ananda DeviQuand la nuit consent à me parler, Éditions Bruno Doucey